Maurice : Rs 5 de moins à la pompe, le symbole avant tout

Samedi à minuit, une petite révolution s’est glissée dans les réservoirs des automobilistes mauriciens. L’essence passe de Rs 66,20 à Rs 61,20 et le diesel de Rs 63,95 à Rs 58,95. Une réduction de Rs 5 par litre, saluée avec un enthousiasme modéré, entre soupir de soulagement et haussement d’épaules. Car si ce geste symbolique du gouvernement arrive à point nommé, il laisse un goût amer dans la bouche des citoyens, tiraillés entre gratitude et scepticisme.

Un « cadeau » après de longues attentes

Le Price Pricing Committee (PPC) a finalement validé une baisse, après une immobilité tarifaire qui durait depuis septembre. Pourtant, à l’international, le prix du baril avait déjà montré des signes de fléchissement. En réponse, la décision du gouvernement s’apparente davantage à une concession arrachée qu’à une stratégie volontariste.

Pour Rajesh Moonesawmy, porte-parole d’une association de consommateurs, la mesure est clairement insuffisante : « Le prix des carburants reste artificiellement gonflé par des taxes. Rs 5 de moins, c’est comme un verre d’eau dans le désert. » Il pointe aussi le manque d’ajustements structurels, comme une révision temporaire des taxes, qui aurait pu alléger la facture.

Un impact limité sur l’économie

Du côté des syndicats, le ton est encore plus acerbe. « Cette réduction est une goutte dans l’océan, incapable de compenser les hausses cumulées des derniers mois, » martèle Dev Sunnasee, leader syndical. Pour lui, les effets domino – sur les transports, les produits de première nécessité et l’économie globale – exigeraient des baisses bien plus significatives.

Les économistes ne sont guère plus optimistes. Meera Balgobin souligne l’impact négligeable de cette mesure sur la compétitivité des entreprises : « Cette baisse ne modifiera ni les coûts de production, ni la chaîne logistique. L’économie restera enlisée dans ses contraintes structurelles. »

Cependant, pour des milliers d’automobilistes comme Anusha, employée de bureau, le soulagement est concret : « Je fais deux pleins par semaine. Cette réduction m’économise Rs 320 par mois. Ce n’est pas énorme, mais c’est toujours ça. »

Un geste politique

Au-delà des calculs économiques, cette baisse revêt une dimension hautement politique. Dans un climat marqué par une inflation galopante, elle envoie un signal – celui d’un gouvernement à l’écoute. Mais pour combien de temps ? Le sociologue Alain Perrine tempère : « C’est une accalmie, pas une solution. Sans réformes globales, le malaise des consommateurs reviendra rapidement. »

Entre geste symbolique et attentes déçues

Rs 5 de moins, c’est une bouffée d’air frais, mais insuffisante face aux attentes des Mauriciens. Ce geste révèle un dilemme plus profond : comment conjuguer efficacité économique et perception citoyenne ? Pour l’heure, le gouvernement a gagné un répit, mais le chronomètre politique reste enclenché.

Fitiavana HARISOA


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