
Dans le contexte actuel, où l’économie mauricienne est scrutée sous toutes ses coutures, le rapport « State of the Economy » présenté récemment par le Premier ministre, Navin Ramgoolam, met en lumière des enjeux essentils. Si ce rapport se veut porteur d’espoir, il soulève également de vives interrogations sur les répercussions socio-économiques qu’il induit. Entre appels à la restructuration et revendications pour une meilleure redistribution des ressources, les acteurs économiques et sociaux s’expriment avec ferveur.
Une économie éprouvée, mais des perspectives à repenser
Takesh Luckho, économiste averti, ne masque pas son scepticisme face au contenu du rapport. « Ce rapport est sans surprise, car à plusieurs reprises, les spécialistes ont tiré la sonnette d’alarme », affirme-t-il. Les incohérences entre les chiffres officiels sur l’inflation et le ressenti de la population en sont un exemple marquant. Tandis que les statistiques indiquent une inflation en baisse, le coût de la vie demeure une source majeure de plaintes parmi les citoyens. Selon Luckho, le modèle économique actuel, fondé sur la surconsommation et une forte dépendance à la taxation indirecte, montre ses limites. « Il faut envisager un nouveau paradigme, éloigné de l’« Inflation Tax » pour survivre. Des allocations sont nécessaires, mais elles doivent s’accompagner d’un contrôle strict de l’inflation afin de préserver leur efficacité », insiste-t-il.
Cette vision s’aligne sur une demande croissante pour des mesures structurelles qui favorisent une croissance économique inclusive et durable. Les initiatives ponctuelles ne suffiront pas, prévient Luckho, pour relancer l’économie de manière soutenue.
Des propositions concrètes pour un avenir équilibré
Du côté de la Consumers’ Union, Deepak Benydin plaide pour des réformes tangibles afin d’alléger la pression sur les consommateurs. « Le gouvernement devrait revoir à la baisse le taux de la TVA sur les denrées essentielles, étant donné qu’il accumule davantage de recettes fiscales avec l’augmentation des prix », propose-t-il. Benydin dénonce aussi une tendance récurrente : à chaque changement de pouvoir, les travailleurs sont souvent les premières victimes des politiques d’austérité.
Le porte-parole de la Consumers’ Union met en avant l’importance d’un « Social Pact » préconisé par le Bureau international du Travail (BIT). Ce pacte pourrait réunir syndicats et gouvernement autour d’une table pour discuter de solutions collectives et pragmatiques. « Dans un contexte d’absence d’opposition structurée, il est essentiel que les syndicats collaborent avec le gouvernement pour identifier des stratégies bénéfiques pour tous », déclare Benydin. MubarakSooltangos, un observateur économique averti, partage cette approche collaborative mais met l’accent sur un enjeu différent : la création de richesse. Selon lui, les mesures de soutien temporaire constituent des palliatifs inefficaces. « Tant que l’économie ne sera pas remise sur les rails d’une croissance réelle et durable, le mieux-vivre des citoyens ne pourra être qu’illusoire », affirme-t-il. Pour Sooltangos, la solution passe par une augmentation du PIB avec la production comme moteur principal.
L’urgence d’une transformation structurelle
Les opinions exprimées par ces acteurs soulignent une nécessité commune : l’adoption de mesures économiques structurelles pour redresser l’économie et réduire les inégalités. Bien que les allocations puissent offrir un répit aux plus vulnérables, elles doivent s’inscrire dans une stratégie globale visant à maîtriser l’inflation, stimuler la production et favoriser une redistribution équitable des ressources.
Pour cela, le dialogue entre les parties prenantes, y compris les syndicats, les économistes, et le gouvernement, est indispensable. Le développement d’un modèle économique adapté à la réalité mauricienne est plus qu’une ambition : c’est une impérative pour garantir un avenir meilleur à l’île et à ses citoyens. Ainsi, alors que le rapport sur l’état de l’économie suscite à la fois réflexion et débat, il constitue également une opportunité pour engager une transformation durable et inclusive. La balle est dans le camp des décideurs.
Fitiavana HARISOA


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