
Avec une population majoritairement jeune, Madagascar pourrait bénéficier d’un dividende démographique inestimable. Cependant, la migration irrégulière des jeunes malgaches prive le pays de compétences essentielles et affaiblit son développement socio-économique. En examinant les causes profondes de cette fuite des talents et en proposant des solutions concrètes, cet article vise à sensibiliser les décideurs et la société civile à l’importance de retenir et valoriser cette jeunesse.
Les raisons profondes d’une fuite inexorable
À Madagascar, plus de 60 % de la population est âgée de moins de 25 ans, mais cette majorité peine à trouver un emploi. Selon les données de la Banque mondiale, le taux de chômage chez les jeunes dépassait 15 % en 2020, avec des disparités significatives entre les zones rurales et urbaines. Dans les campagnes, où réside la majorité de la population, le manque d’infrastructures et d’accès à des opportunités de formation et d’emploi pousse les jeunes à envisager l’émigration comme une solution de survie.
D’après l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), environ quinze mille jeunes Malgaches ont tenté d’émigrer clandestinement en 2020. Cette tendance, en constante augmentation, est alimentée par une perception selon laquelle l’étranger offre de meilleures opportunités économiques et sociales. Les secteurs stratégiques comme l’agriculture, la santé et le numérique subissent les conséquences directes de cette fuite des talents, créant un déficit de compétences cruciales pour le développement du pays.
Des politiques insuffisantes et des conséquences durables
Malgré les efforts des autorités pour contrôler les flux migratoires, certaines mesures, comme la suspension des visas de sortie, ont souvent eu l’effet contraire. Au lieu de réduire les départs, elles ont encouragé les migrations irrégulières, organisées par des réseaux clandestins. Ces départs exposent les migrants à des risques considérables, notamment l’exploitation, les abus et l’incertitude d’un avenir meilleur. L’Institut national de la statistique de Madagascar (Instat) souligne que cette perte de main-d’œuvre qualifiée affaiblit des secteurs essentiels comme l’éducation et la santé. Les compétences qui auraient pu stimuler l’économie nationale sont ainsi transférées à l’étranger, laissant un vide difficile à combler. Par ailleurs, les familles des migrants, souvent appauvries, se retrouvent dépendantes des envois de fonds, ce qui ne constitue pas une solution durable au développement.
Changer de cap : des solutions pour un avenir meilleur
Pour inverser cette tendance, le gouvernement et les partenaires internationaux doivent prioriser l’investissement dans l’éducation et la création d’emplois. Des programmes de formation professionnelle adaptés aux besoins du marché pourraient équiper les jeunes des compétences nécessaires pour s’intégrer dans l’économie locale. Le secteur agricole, par exemple, pourrait être modernisé pour attirer les jeunes et générer de nouvelles opportunités. L’entrepreneuriat représente une alternative viable pour offrir des perspectives aux jeunes Malgaches. Le développement d’écosystèmes d’innovation, avec des incubateurs d’entreprises et des financements accessibles, pourrait encourager les jeunes à rester et contribuer au développement local. De plus, la valorisation des initiatives locales, notamment dans le numérique, pourrait créer des emplois attractifs et compétitifs.
Enfin, il est nécessaire de réformer les politiques migratoires pour faciliter les migrations légales et sécurisées. Une collaboration accrue avec les pays de destination et les organisations internationales pourrait garantir que les migrations, lorsqu’elles ont lieu, soient bénéfiques tant pour le pays d’origine que pour celui d’accueil. Par exemple, des programmes de retour volontaire et d’intégration des compétences acquises à l’étranger pourraient atténuer l’impact négatif de la fuite des talents.
Fitiavana HARISOA


Laisser un commentaire