A Tana, petits métiers et grandes galères face à la soif.

« Je cuisine à l’instinct, pas à l’eau ». Lova rigole un instant, puis soupire. Derrière son stand à Analakely, cette gargotière bataille pour faire bouillir ses légumes. Une casserole sur le feu, deux bidons achetés aux prix fort et une pensée qui tourne en boucle : « Si je n’ai pas d’eau, je n’ai pas de clients. Et si je n’ai pas de clients, je ne mange pas. »

A Antananarivo, la pénurie d’eau n’est plus une anomalie. C’est la norme. Depuis des mois, quartiers populaires comme zones urbaines font face à des coupures fréquentes. Et ce sont les métiers de l’eau ; gargotiers, coiffeurs, porteurs, soignants qui subissent les premiers.

Des mains sales, des risques graves

Le simple geste de se laver les mains, vital contre le choléra ou la typhoïde devient un luxe. Dans certains quartiers, même les toilettes deviennent décoratives. Résultat : la faire ses besoins à l’air libre gagne du terrain, avec son lot de maladies hydriques en embuscade.

Ecoles et hôpitaux à sec

Les établissements scolaires raccourcissent les journées. Les centres de santé, eux, avancent à tâtons. Lavage de matériel, désinfection, soins post-opératoires : tout est compromis sans une goutte d’eau. Et pendant ce temps, la JIRAMA évoque des réservoirs trop bas, des canalisations usés et des travaux promis mais trop lents.

Un coût qui étouffe les plus précaires

« 1000 ariary le bidon ! Et on me demande de vendre le plat à 2500 ariary ? Je fais comment ? » Lova hausse les épaules.  Elle n’est pas seule. Derrière chaque seau d’eau, c’est une économie informelle à bout de souffle. Et ce sont les pauvres qui paient le prix fort d’un droit fondamental devenu payant.

Une ville qui grandit, des robinets qui fuient

À Tana, l’eau potable n’arrive pas à suivre le rythme effréné de l’urbanisation. Pendant que les buildings montent, les tuyaux rouillent. L’accès à l’eau reste un privilège. Et chaque coupure aggrave les inégalités. Car sans eau, il n’y a ni dignité, ni santé, ni travail.

Hadjani ANDRIANARINIVO