Maurice : Trop fatigué pour espérer – trop fâché pour rester – un mal être au travail  

Salaires trop bas, managers déconnectés, quête de sens… Une étude tire la sonnette d’alarme : à Maurice, 7 jeunes salariés insatisfaits sur 10 songent à partir. Et si c’était un cri qu’on refuse d’entendre ?

« Je ne veux pas mener une vie où je travaille juste pour payer mon loyer. Je veux vivre. » Ces mots sont ceux de Mélissa, 27 ans, assistante administrative dans une PME du Sud. Tous les matins, elle se lève avec la boule au ventre. Elle gagne un peu plus que le salaire minimum, ne bénéficie d’aucune formation, aucune perspective d’évolution. Son rêve ? Faire ses valises pour le Canada. Et elle n’est pas la seule.

Une étude menée par le cabinet Analysis auprès de 780 salariés mauriciens est venue mettre des chiffres sur un mal-être qu’on ressentait sans toujours savoir l’expliquer. 70 % des travailleurs insatisfaits envisagent l’émigration. Oui, 7 sur 10. Ce n’est pas qu’une fuite de cerveaux : c’est une fuite de cœur, de souffle, d’espoir.

Le travail ? Une prison sans clés

Ceux qui sont partis ne le font pas uniquement pour des salaires plus élevés. Ils partent parce qu’ici, le travail n’a plus de sens. Parce que la reconnaissance est rare, la communication absente, et la flexibilité quasi inexistante. 64 % ne font jamais de télétravail, alors même que la demande pour plus de flexibilité explose. Pour 8 personnes sur 10, aller bosser, c’est d’abord survivre.

Virginie Villeneuve, d’Analysis, résume : « On parle souvent de quête de sens. Mais derrière ce mot, il y a des besoins très concrets : équilibre de vie, valorisation, avenir. »

Les jeunes et les femmes – premières victimes

Ce mal-être est plus aigu chez les jeunes et les femmes. L’état mental de ces deux groupes est plus fragile. Ils peinent à se projeter. Ils ne se sentent ni écoutés ni compris. Ce n’est pas un hasard si seulement 31 % des postes à responsabilité sont occupés par des femmes. De plus, d’après Marie Hélène Walter, psychothérapeute, plusieurs entreprises ne parlent plus la langue des jeunes et quand ils ne trouvent pas leur place, ils cherchent ailleurs.

Repenser le travail, ici, maintenant

Mais est-il trop tard ? Non. L’étude montre aussi des pistes claires : donner plus d’autonomie, valoriser les efforts, incarner la méritocratie et surtout, parler vrai. La jeunesse d’ici ne veut pas de slogans. Elle veut des actes. Des preuves qu’elle compte.

Il faut choisir d’écouter cette parole. Pas pour faire joli. Pour éviter que demain, d’autres Mélissa n’aient plus qu’une envie : quitter leur île qu’elles aiment, mais qui ne les entend plus.

Hadjani ANDRIANARINIVO

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