La Réunion : le cri silencieux des Réunionnais surendettés

Femmes seules, mères, jeunes précaires… À La Réunion, le surendettement explose. Ce ne sont pas que des chiffres, ce sont des vies.

C’est une femme. Seule. Trois enfants. Un frigo souvent vide. Elle ne s’appelle pas Marie, pas officiellement. Mais elle ressemble à tant d’autres. Elle survit avec les aides sociales, jongle entre loyer, factures, cantine scolaire. Un matin, c’est la coupure d’électricité. Un autre, l’huissier qui toque. Et puis vient le mot qu’on n’ose pas prononcer : le surendettement.

À La Réunion, près de 1 800 dossiers ont été déposés en un an. Et depuis janvier, plus de 600 nouveaux cas. C’est une dizaine chaque jour. Un chiffre sec, mais qui cache une réalité très humaine : des familles à bout, souvent des femmes, parfois des jeunes, tous pris dans une spirale infernale.

Une inflation qui ne fait pas de cadeau

Tout a commencé avec la flambée des prix en 2022. Puis l’accélération en 2023. Et 2024 ? Pire encore. Les produits de première nécessité ; riz, légumes, abonnements téléphoniques, essence ont grimpé. Le cyclone Garance, en début d’année, a mis un nouveau coup de massue : jusqu’à 37 % de hausse sur les produits frais. Et il faudra presque un an pour que les prix redescendent, si un nouvel événement climatique ne frappe pas avant.

Plus de dettes que de jours dans le mois

À force de payer en retard, d’emprunter pour rembourser, de vivre avec le découvert comme norme, beaucoup finissent par dire stop. C’est là qu’intervient l’IEDOM, un organisme qui traite les dossiers de surendettement. Il propose des solutions : rééchelonner les dettes, étaler les paiements sur plusieurs années, voire effacer une partie des dettes dans les cas les plus graves. Une lueur d’espoir : 80 % des situations trouvent une issue.

La Réunion, championne… malgré elle

Dans tout l’Outre-mer, c’est La Réunion qui dépose le plus de dossiers : 51 %, loin devant la Guadeloupe ou la Martinique. L’île dépasse même la moyenne nationale en nombre de dépôts pour 10 000 habitants. C’est plus qu’un problème économique, c’est un signal d’alarme social.

« J’ai honte de demander de l’aide ». Ce sont ces paroles qu’on entend le plus souvent. Pourtant, demander de l’aide n’est pas un échec, c’est un acte de courage. Aller voir un conseiller, monter un dossier, c’est refuser de sombrer.

Ce ne sont pas des statistiques. Ce sont des visages. Des mamans qui pleurent en cachette. Des jeunes qui dorment le ventre vide. Des familles qui s’accrochent.
Et si on écoutait enfin leur histoire, au lieu de regarder seulement les chiffres ?

Hadjani ANDRIANARINIVO

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