
Entre promesses d’infrastructures et galères du quotidien, une conférence à Dembéni met les pieds dans le plat : il est temps que Mayotte vive au même rythme que la République.
Une conférence sur la « convergence sociale et économique » se tient, avec dans la salle des syndicalistes fatigués, des patrons inquiets et en première ligne, le général Facon et le préfet Bieuville. Derrière les mots techniques, une promesse : faire de Mayotte un territoire à égalité de droits avec la métropole. Mais les Mahorais n’attendent plus des promesses. Ils veulent des actes. « L’eau, c’est vital. L’égalité aussi. On ne peut pas reconstruire des routes si les gens ne peuvent pas remplir leur frigo », lâche Fatouma, 32 ans, mère de trois enfants à Cavani.
Une île stratégique, mais à bout de souffle
L’État parle de faire de Mayotte une plateforme régionale : port modernisé à Longoni, nouvel aéroport, zone d’activités au nord. Tout ça pour « ancrer Mayotte dans le canal du Mozambique », zone devenue géopolitique. Mais dans les villages, l’eau coule parfois une heure par jour. Et l’égalité sociale ? Elle reste un mirage.
Le préfet annonce 850 millions d’euros pour l’eau : une usine de dessalement, une nouvelle retenue d’eau. Des projets bienvenus, mais trop lents pour ceux qui vivent avec des bouteilles comme seules ressources.
Converger, mais à quel prix ?
Derrière les discours, un mot revient : convergence. Traduction : aligner les droits sociaux, les salaires, les services sur ceux de la métropole. Mais comment imposer un SMIC métropolitain à des entreprises locales déjà fragiles ? Comment parler de retraite quand des milliers de Mahorais n’ont jamais eu de fiche de paie ?« On veut l’égalité, pas l’asphyxie », avertit Ahamada, jeune entrepreneur à Mamoudzou. « Que l’État aide les entreprises à suivre, sinon on court à la catastrophe. »
Un général pour reconstruire l’île
À la tête de la mission de (re)construction, un visage : celui du général Pascal Facon. Un militaire pour bâtir la paix sociale, comme le général Georgelin à Notre-Dame. Sa mission est de créer un nouvel établissement pour piloter les projets d’infrastructure, repenser le foncier, accélérer les chantiers. Il promet une structure opérationnelle dès décembre 2025.
Mais pour les habitants, la vraie urgence ne se mesure pas en béton armé. Elle se vit dans les files d’attente au dispensaire, dans les bus surchargés, dans les salaires trop bas pour vivre dignement.
Une île qui mérite mieux
Mayotte n’a pas besoin qu’on la sauve. Elle a besoin qu’on l’écoute. Que l’on cesse de lui imposer un avenir sans sa voix. À Dembéni, on a commencé à parler de rythme, de calendrier, de bénéficiaires. Il faudra maintenant parler de respect, de justice, d’humain.
Un chantier se prépare. Un peuple attend. Plus qu’un rattrapage, c’est une reconnexion à la République qu’il réclame. Sans quoi, même les plus solides fondations risquent de s’effondrer.


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