
« Nous, on ferme les robinets à 18 h. Pas pour économiser, mais parce qu’il n’y a plus rien qui coule. » — Habitante de Bras-Panon
C’est le quotidien de milliers d’habitants de l’Est réunionnais : coupures d’eau à répétition, bassines en plastique dans les cours, enfants lavés au gant. Pendant ce temps, les grandes promesses prennent l’eau. Littéralement. Le projet MEREN, censé redonner accès à l’eau aux communes les plus touchées, est reporté. Encore. Prévu pour démarrer en 2024, il est désormais annoncé pour 2027. Son ambition : faire basculer une partie de la ressource en eau du nord vers l’Est, via une vaste conduite entre Saint-Denis et Saint-André, accompagnée de réservoirs et de kilomètres de canalisations. « On parle de justice hydraulique, mais ça fait vingt ans qu’on attend. On ne vit pas sur une autre île pourtant. »
— Agriculteur de l’Est
L’eau, outil de survie et de dignité
Sur une île où il tombe chaque année plus de 7 milliards de m³ d’eau, comment expliquer que des communes vivent toujours sous restrictions ? La réponse tient en un mot : répartition. L’Ouest est équipé. L’Est attend toujours son tour. Dans cette inégalité d’accès, ce sont les familles, les maraîchers, les éleveurs qui paient le prix. Le projet MEREN porte une promesse concrète : irriguer 3 000 hectares, sécuriser l’eau pour l’agriculture, les entreprises, les habitants. Un changement d’échelle. Mais pourquoi faut-il encore attendre une décennie pour en voir les effets ?
Quand l’eau usée devient espoir
En parallèle, un autre chantier émerge : MEREN-REUT. Derrière cet acronyme technique, une idée puissante : réutiliser les eaux usées traitées de la station du Grand Prado pour irriguer les cultures. Traitée à un niveau de qualité A, cette eau serait apte à nourrir la terre – y compris pour les cultures maraîchères. Un projet circulaire, durable, soutenu par l’AFD et le Département. Mais là encore : mise en œuvre prévue pour… 2027. « C’est bien d’y penser, mais nous, on a besoin d’eau aujourd’hui, pas en 2035. »
Trop tard pour attendre
Ce que vit l’Est n’est pas un problème technique, c’est une question de justice territoriale. Tandis que certains lavent leur voiture, d’autres remplissent des bidons pour boire. Le Département promet. L’AFD finance. Mais les familles, elles, comptent les jours. Ce projet est vital. Il ne doit pas devenir un énième serpent de mer réunionnais. Il est temps de passer des plans aux actes. Car ici, l’eau n’est pas un confort. C’est une dignité.
— Hadjani ANDRIANARINIVO


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